Ce 22 janvier 2013, une dépêche de l’AFP annonçait la condamnation à mort d’une grand-mère de nationalité britannique. En effet, à Bali, cette femme a été condamnée à mort pour trafic de stupéfiant. Elle avait été arrêtée en possession de quelques kilos de cocaïne alors que celle-ci avait été contrainte par un réseau de stupéfiant à passer de la drogue pour eux.
Le tribunal de l'île indonésienne de Bali a condamné à mort ce jour, mardi 22 janvier 2013 Lindsay Sandiford, cette grand-mère de nationalité britannique. Alors même qu’elle avait elle-même aidé la police pour démanteler le réseau permettant plusieurs arrestations. L’un des juges du tribunal ayant prononcé la sentence, a estimé que l'accusée n'avait « aucune circonstance atténuante ».
Pratiquer des peines sévères pourquoi pas, infliger la mort, c’est tout autre chose. Il serait faux de croire que la peine de mort serait la forme la plus extrême de sévérité qu’une société civilisée puisse connaître. Ce n’est pas œuvre d’une société civilisée de prononcer une condamnation qui a pour but d’anéantir la vie humaine, même si l’on estime que cette personne mériterait cent fois d’être exécutée.
Quel genre de peine peut être acceptée par un Etat civilisé lorsque cette prétendue peine est par nature appliquée sans recours possible, sans retour en arrière possible, une peine qui par nature, nie toute possibilité de pardon ou d’erreur : « nombreux sont ceux qui vivent et mériteraient la mort. Et certains qui meurent et qui pourtant mériteraient la vie. Pouvez-vous la leur donner ? Alors ne soyez pas trop prompt à dispenser la mort en jugement. » (Le Seigneur des anneaux)
C’est Robert Badinter dans son Discours à l’Assemblée nationale le 17 Septembre 1981 qui portait aux élus du peuple français cette vérité selon laquelle « ceux qui croient à la valeur dissuasive de la peine de mort méconnaissent la vérité humaine. La passion criminelle n'est pas plus arrêtée par la peur de la mort que d'autres passions ne le sont qui, celles-là, sont nobles. » Et l’on sait que certains pays comme les Etats-Unis ou comme ici, l'Indonésie tente de lutter contre la criminalité en voulant «dispenser la mort en jugement. » Mais quel est le succès que l’on connaît à une telle entreprise ? Aucun ! Strictement aucun.
Indépendamment de l’efficacité et de la crédibilité de la sanction, c’est surtout toute l’identité de notre société et de ses individus qui est en cause à travers le choix de la peine de mort et tout particulièrement notre réalité projetée dans ce que l’on prétendrait être une civilisation. « La prise de position d'un homme devant la peine de mort est pour moi un test absolu de son niveau de civilisation.» disait le journaliste Maurice Chapelan et je crois qu’il n’avait pas tout à fait tort car c’est d’abord et avant tout par l’homme et son état d’esprit, sa mentalité et sa philosophie que la structure identitaire de toute société se construit vers une forme réellement civilisée.
Victor Hugo disait que « la peine de mort est le signe spécial et éternel de la barbarie.» (Actes et Paroles), antithèse absolue de la société civilisée. C’est pourquoi le recours à la forme la plus primitive et barbare de la sanction est toujours la preuve manifeste et évidente de l’échec d’un Etat souverain et de son pouvoir politique à remplir dignement et humainement les fonctions qui sont les siennes dans le cadre d’une société prétendument civilisée.
Isaac Asimov faisait dire à l’un de ses personnages dans ses romans que « la violence est le dernier refuge de l’incompétence » (Fondation). Et la peine de mort si tant est que ce soit véritablement qualifiable de « peine » est la manifestation la plus extrême de cette incompétence. Toute société qui ne sait que dispenser la mort pour tout jugement révèle son échec et sa propre incompétence.
Et jusqu'où peut aller pour estimer nécessaire et raisonnable l'application de cet acte de barbarie lorsqu'il s'agit d'une quinquagénaire qui transportait sur elle quelques kilos de stupéfiants ?